Ouverte
en 1968, la décharge de Mbeubeuss, située dans la banlieue, à Malika, abrite
toutes les ordures de la région du Cap – Vert, Dakar.  Défis écologiques, risques sanitaires …  telles sont les menaces qui pèsent sur les
épaules de ceux qui fréquentent les lieux et les habitants du quartier. 
Cette
partie du département de Pikine amasse et entasse tous les déchets que rejette
la société consommatrice. A notre arrivée vers 11h, en ce jour de dimanche, une
odeur asphyxiante et nauséabonde  nous
accueille. Il faut se boucher le
nez avec un mouchoir pour échapper à une toux soudaine. Les camions défilent
les uns après les autres pour décharger leurs ordures. Malgré le courant d’air froid,
des  jeunes, des femmes et même des
enfants s’activent à la fouille, récupération et revente des fers, bouteilles, cartons
etc. Ils sont plus d’une centaine à fréquenter 
Mbeubeuss qui s’étend sur 175 hectares. « Je fréquente ici depuis presque 7ans et je tire toutes mes
ressources dans ce travail. Je nourris toute ma famille avec l’argent des
ordures .» nous dit Amadou Diop, ce cinquantenaire trouvé sur les montagnes
de déchets. Non loin de lui, on aperçoit un groupe d’enfants, habits en haillon,
entrain de fouiller dans les ordures. « Nous
venons souvent ici pour chercher des ferrailles qu’on va ensuite revendre. Il y
a des gens qui les achètent juste à l’entrée.» nous souffle Mamadou Gueye,
élève en classe de 5ème secondaire. Avec sa taille moyenne et son
teint noir, Mamadou fugue les cours pour venir se faire de l’argent dans cet
endroit qu’il aime bien. 
Les nombreux risques de
Mbeubeuss n’ébranlent guère ces occupants qui y passent tout leur temps. Vêtu
d’un boubou bleu sombre et tenant un sac sur son épaule droite, Gora Gueye, 28
ans, sait que sa présence sur ces lieux comporte des risques. « Nous savons qu’il y a des risques
énormes mais nous sommes obligés de cohabiter avec ces dangers. C’est vraiment
un mal nécessaire. » laisse t- il entendre. Trouvé plus loin, au milieu des
montagnes de déchets, Sayer Fall, masque de protection sur le visage, avec des
gans qui couvrent les mains, est conscient lui des menaces. «  Puis que nous ne pouvons pas quitter
ces lieux, il faut cependant se protéger avec les moyens de bord pour se
prémunir des dangers. », nous explique t- il.
Dans ce
dépotoir, même s’il n’est pas facile d’y travailler, les récupérateurs y
gagnent beaucoup. En face des monticules de déchets, dans une des cabanes, allongeant
le long du site, se trouve Abdou Khouma, teint noir, taille moyenne, avoisinant
la trentaine, qui a quitté famille et proche pour s’installer définitivement à
Mbeubeuss. « Je
suis là depuis cinq ans et je m’en sors plutôt bien malgré les conditions
précaires dans lesquelles nous travaillons. Il m’arrive de gagner 3000 à 5000 f
CFA par jour. Sincèrement je ne me plains pas du tout.», déclare t-il. En face des cabanes,
sont garés des camions vides. Selon A. Khouma, des entreprises viennent souvent
ici pour acheter les objets  récupérés à
des prix vraiment intéressants. Ces camions vont transporter les objets déjà
récupérés pour le recyclage dans les usines. 
Le bonheur
des uns fait le malheur des autres. A Mbeubeuss, les riverains crient nuit et
jour leur désarroi. Ils se sentent menacés par les dangers auxquels  leurs familles encourent tous les jours. Le
ronronnement des camions qui se défilent toute la journée dérange la quiétude
des habitants. Assise devant son domicile, à quelques centaines de mètres du
dépotoir, une maison à 2 étages, Fatou Kiné Diallo, la quinquagénaire, raconte
leur calvaire : «  Tous les
jours, nous faisons des va et vient entre l’hôpital et la maison. Et tout ça à
cause des déchets avec lesquels nous vivons ». Selon cette mère de famille,
le district sanitaire de Malika ne reçoit que des malades issus des alentours
de Mbeubeuss. Les nombreux cas de tuberculose hantent le sommeil de ces gens
qui pensent tout leur temps à veiller et à nourrir leurs progénitures. Pour la plupart, l’Etat doit fermer ce
dépotoir et le transférer ailleurs parce que l’endroit est trop proche d’eux. « Nous avions organisé une marche pour
nous faire entendre mais jusqu’ à présent nos revendications ne sont pas prises
en compte. » nous explique Maimouna Diop, sacoche à la main.
Un souhait
vite battu en brèche par certains récupérateurs.  Tout en sueur, le vieux Moustapha Dieng, vêtu d’une
tenue de travail, se défend : « C’est
impensable de délocaliser ce site vu qu’il nous rapporte beaucoup de choses
mais aussi à l’Etat qui en tire des bénéfices. Délocaliser Mbeubeuss ne doit
pas être à l’ordre du jour, il y’a des choses plus importantes». « Même l’Etat ne peut pas trouver un
endroit meilleur qu’ici. » poursuit son compagnon, Abdoulaye Diop, la
cinquantaine bien sonnée. 
Mbeubeuss avec ses monticules de déchets doit il
disparaitre ou non ? En tout cas, le moment est venu pour que les autorités
prennent des mesures énergiques pour protéger les habitants contre cette bombe
écologique.

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